Les conséquences de l’arrivée d’Alibaba et d’une extension de Liege Airport sur la santé sont nombreuses : pollution de l’air (particules fines, oxydes d’azote), nuisances sonores (bruit, qualité du sommeil, risques cardio-vasculaires). Ces menaces bien réelles se conjuguent souvent avec des risques de dégradation de l’environnement local comme global ainsi qu’un coût accru des dépenses publiques dans le domaine de la santé.
Pollution de l’air
L’aviation : un facteur aggravant
Les moteurs d’avions émettent de nombreux gaz polluants – particulièrement des gaz précurseurs d’ozone – et des particules qui, d’une part altèrent la composition chimique de l’atmosphère et, d’autre part, participent au réchauffement climatique.
Cette pollution se répartit sur trois échelles 1 :
- Locale – cela concerne la qualité de l’air ambiant aux alentours des sources d’émissions, dans un rayon de quelques kilomètres.
- Régionale – il s’agit, à des distances de quelques kilomètres à un millier de kilomètres, de pollutions de type pluies acides, réactions photochimiques et dégradation de la qualité des eaux.
- Globale – il s’agit principalement, au niveau planétaire, de l’appauvrissement de la couche d’ozone et du réchauffement climatique provoqué par l’émission de gaz à effet de serre, principalement le gaz carbonique (CO2).
Ainsi, au-delà de renforcer l’effet de serre et de précipiter le réchauffement climatique à une échelle globale, le développement de l’aviation a un impact certain sur notre santé à l’échelle locale. Près du sol, aux environs de l’aéroport, de nombreux polluants sont émis par les avions. Parmi ceux-ci, les scientifiques attirent particulièrement l’attention sur les dangers liés au monoxyde de carbone et aux particules ultrafines en suspension2.
La pollution aux particules fines : un risque sanitaire sérieux
Les particules fines sont des polluants particulièrement nocifs puisqu’elles pénètrent en profondeur dans les poumons. Plus ces dernières sont fines, plus elles pénètrent loin dans les voies respiratoires, pouvant alors atteindre les bronches3. À noter que les mesures effectuées à Liege Airport renseignent la concentration en particules fines inférieure à 10µm (PM10) mais supérieure à 2,5 µm (PM2,5). De plus, le positionnement de la station de mesure reste très discutable.
Ces particules fines peuvent être à l’origine d’inflammations et de l’aggravation de l’état de santé des personnes atteintes de maladies cardiaques et pulmonaires. Ces particules absorbent également des composés cancérigènes à leur surface, qu’elles transportent jusqu’aux bronches.
Le trafic routier lié aux activités de l’aéroport : des conséquences manifestes
La circulation de camions induite par les activités de l’aéroport renforcera la pollution déjà fortement ressentie dans la région liégeoise. Ce trafic est l’une des principales sources d’émission de polluants préoccupants pour la santé4. Ces polluants ont des effets (parfois cumulés) sur notre santé : irritation des voies respiratoires, augmentation du risque d’allergies et d’asthme, asphyxie au monoxyde de carbone altérant les fonctions cardio-vasculaires, toxicité et effets cancérigènes5. Parmi ces polluants, les risques associés aux oxydes d’azote et aux particules fines sont particulièrement inquiétants.
La pollution au dioxyde d’azote : 1600 décès prématurés en 2016 en Belgique
Les valeurs limites d’oxyde d’azote définies par la directive européenne ont récemment été remises en question dans une étude6 commandée par Greenpeace. Cette étude met en avant le fait qu’il n’existe pas de valeurs sûres pour ce gaz. En effet, tant les expositions de courte durée à de fortes concentrations qu’une exposition prolongée à de faibles concentrations sont nocives pour notre santé, et certainement pour celle des enfants.
Par ailleurs, le rapport 2019 de l’Agence Européenne pour l’Environnement7 nous apprend que le NO2 a provoqué 71 000 décès prématurés en Europe en 2016. En ce qui concerne la Belgique, le rapport fait état de 1600 décès prématurés associés à ce polluant.
Pour chaque augmentation de 10 µg/m3 (moyenne sur 24 heures) de l’exposition au NO2, l’OMS table sur une augmentation de 1,8% des admissions hospitalières dues à des problèmes respiratoires, et ce pour toutes les tranches d’âges. Cette situation exerce une pression croissante sur les services de santé et les services publics8.
Les taux de NO2 dans l’air sont donc une question majeure de santé publique et le projet d’extension de Liege Airport ainsi que l’augmentation du trafic routier qui en découle sont clairement un obstacle à cette prévention de la santé des citoyens.
Pas de valeurs limites assurant le risque zéro
L’article 2 du permis d’environnement délivré à Liege Airport S.A. dans le cadre de l’exploitation de l’aéroport de Liège-Bierset mentionne l’obligation d’installer dans le voisinage de la zone d’activité aéroportuaire une station de mesure de la qualité de l’air ambiant, comprenant la mesure des particules fines (Fraction PM10) et des oxydes d’azote (Nox). Initialement, cinq relevés devaient avoir lieu : une mesure centrale et quatre en croix en dehors des limites de l’aéroport. Seule la station centrale est maintenant obligatoire et située à l’endroit le moins pollué.
Les résultats de ces mesures (qui s’effectuent depuis 2012) montrent que les valeurs limites définies par la directive européenne 2008/50/CE sont respectées à Liege Airport (cf. les rapports annuels de 2015 et 2016). À noter que les polluants émis par les avions ont un impact sur la qualité de l’air au sol uniquement au moment du décollage et dans un périmètre très restreint autour des pistes. Dès que les avions prennent de l’altitude, les polluants qu’ils émettent n’influencent quasiment plus les concentrations mesurées au sol puisqu’ils sont dispersés dans l’atmosphère9.
Cependant, ces valeurs limites n’assurent pas un risque zéro pour la santé. En effet, certaines populations sont particulièrement sensibles à cette pollution : les enfants, les personnes âgées, les personnes déjà fragilisées (insuffisants cardiaques ou respiratoires, asthmatiques ou personnes atteintes de bronchites chroniques). En outre, plusieurs études démontrent des effets nocifs sur la santé même en deçà des seuils réglementaires10.
Enfin, aucun monitoring concernant la pollution aux particules ultrafines (inférieures à 2,5µm) n’est réalisé actuellement aux alentours de Liege Airport. Des études réalisées dans plusieurs villes européennes disposant d’aéroports mettent pourtant en évidence les impacts significatifs des particules ultrafines sur la santé11.
Le développement de Liege Airport : une augmentation de la pollution de l’air à l’échelle locale
L’objectif à moyen terme de Liege Airport est de rentrer dans le top 3 des aéroports cargo d’Europe12. Pour rencontrer ces objectifs, le nombre de vols cargo va indubitablement augmenter ainsi que le nombre de camions par jour13.
Si l’aviation contribue partiellement à la pollution aux échelles locale, régionale et globale, le trafic routier reste l’une des principales sources d’émission de polluants préoccupants pour la santé à l’échelle locale, qui s’additionne donc à la pollution émise par les vols d’avions.
Nuisances sonores
Les effets du bruit ne se limitent pas à la sphère auditive
Le bruit est un enjeu important de santé publique car il a des conséquences néfastes sur la santé et le bien-être. En effet, contrairement aux idées reçues, les effets du bruit ne se limitent pas à la sphère auditive :
- Atteinte à la qualité du sommeil – indispensable pour récupérer nos forces physiques et mentales.
- Désordres cardio-vasculaires – les hormones liées au stress que provoque le bruit sont à mêmes de perturber le rythme cardiaque ou d’augmenter le métabolisme des graisses.
- Diminution de nos défenses immunitaires – ce qui nous rend davantage fragiles aux agressions et plus sujets à la dépression14.
Les riverains souffrent de plus en plus des vols de nuit
L’OMS préconise fortement de maintenir le niveau sonore du trafic aérien en dessous de 55 décibels en journée et 44 décibels la nuit. Si des mesures sont prises par la SOWAER pour surveiller ces nuisances liées au bruit et pour accompagner les citoyens dans l’insonorisation de leurs habitations, le nombre de plaintes des riverains ne cesse pourtant d’augmenter15. Deux hypothèses à ces plaintes sont avancées par la SOWAER16 :
- Le non-respect des trajectoires – Habituellement, les avions décollent et atterrissent dans le sens du vent dominant. Régulièrement cependant (près de 20% des vols), les manœuvres s’effectuent dans le sens inverse en raison des vents dominants. Les avions doivent également effectuer une boucle qui les fait sortir des zones préétablies17.
- L’augmentation d’avions gros porteurs – Depuis quelques mois, l’aéroport de Liège accueille plus d’avions gros porteurs. Ces avions, plus lourds, émettent plus de bruit pour porter leur lourde charge.
Par ailleurs, les nuisances nocturnes sont perçues comme plus importantes que durant la journée, ce qui renforce la gêne occasionnée aux riverains.
Le développement de Liege Airport : une augmentation des nuisances sonores
La croissance exponentielle des activités de l’aéroport implique davantage de vols nocturnes (la réussite de Liege Airport repose effectivement sur son service « 24h/24, 7j/7 »18) et davantage d’avions gros porteurs à même de transporter ces millions de tonnes de marchandises. Il ne fait aucun doute que cette croissance augmentera l’intensité des nuisances sonores aux alentours de l’aéroport.
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- https://www.stac.aviation-civile.gouv.fr/fr/environnement/aviation-pollution-atmospherique
- https://www.mdpi.com/2071-1050/11/7/2102/pdf
- https://www.respire-asso.org/particules-en-suspension-pm10-pm-25/
- https://environnement.brussels/thematiques/air-climat/qualite-de-lair/influence-de-la-mobilite
- http://www.sante-environnement.be/Les-aeroports-source-importante-de-pollution-de-l-air
- http://www.greenpeace.org/archive-belgium/Global/belgium/report/2017/Full_European_Human_health_from_NO2_exposure_FR.pdf
- https://www.eea.europa.eu/fr/publications/environnement-en-europe-etat-et-perspectives-2020
- http://www.greenpeace.org/archive-belgium/Global/belgium/report/2017/Every-Breath-A-Threat-summary-FR.pdf
- https://environnement.brussels/thematiques/air-climat/qualite-de-lair/etudes-belges-devaluation-de-la-qualite-de-lair-proximite-des
- http://www.greenpeace.org/archive-belgium/Global/belgium/report/2017/Every-Breath-A-Threat-summary-FR.pdf
- https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S016041201931832X
- https://www.lesoir.be/260372/article/2019-11-14/liege-airport-vise-le-top-3-des-aeroports-cargo-dans-les-dix-ans
- https://www.lalibre.be/regions/liege/alibaba-a-bierset-on-va-atteindre-2-000-camions-par-jour-5c4c30707b50a60724ff81c9
- http://environnement.sante.wallonie.be/home/au-quotidien/environnement-exterieur/bruit/page-1.html
- https://www.sudinfo.be/id104145/article/2019-02-26/la-carte-du-bruit-de-liege-airport-moins-de-vols-mais-davantage-de-bruit-en-2018
- https://www.rtl.be/info/regions/liege/nuisances-sonores-993716.aspx
- https://www.lavenir.net/cnt/dmf20180713_01196141/avions-bruyants-a-liege-le-vent-de-secteur-nord-est-est-une-explication
- https://www.liegeairport.com/corporate/fr/